vendredi 28 octobre 2011

De l'éducation des enfants

  J'ai eu une éducation très stricte.
  Je suis l'aînée de ma fratrie, j'ai eu des complications à la naissance: la vie a toujours été pour moi un cadeau, j'ai su plus tard que j'aurais pu y laisser ma vie.
  Du plus loin que je me souvienne, jamais ma mère ne m'a prise dans ses bras, ni embrassée (ou alors du bout des lèvres pour nous souhaiter bonne nuit), elle ne m'a jamais dit qu'elle m'aimait, qu'elle était fière de moi (sauf en danse, seule passion que nous partagions), je n'étais jamais assez bonne à l'école (combien de cahiers ai-je reçus sur la tête? Et les 5 mn pour apprendre ma leçon par coeur (oui, oui, les phrases dans l'ordre sans se tromper!), passées à regarder l'aiguille et l'heure avant d'aller au lit!; dans les matières où j'étais douée, si j'avais en-dessous de mon 15 de moyenne, c'était "nul"; si j'avais plus de 10 en maths (moyenne de 5!), c'était "normal"!
  Je n'ai jamais causé de problèmes, je travaillais bien à l'école (dans la moyenne haute), intelligente et curieuse de tout, j'étais une enfant sage et sans histoire. Pourtant ma mère n'a jamais cessé de nous dénigrer, elle a les pires enfants du monde! Jamais de compliments, de sourires, de câlins, le bisou du soir donné du bout des lèvres avec gêne. J'ai longtemps cru que les mères aimantes n'existaient que dans les livres, que mes copines mentaient.
De 6 à 7 ans, j'ai cherché ce qu'elle pouvait me reprocher! Je me suis astreinte durant une semaine à la perfection, ça a été comme d'habitude et j'ai compris que cela ne venait pas de moi. J'ai cherché comment l'atteindre sans succès!

  Aujourd'hui? Je n'ai pas de plaisir à aller chez mes parents, je m'y sens mal! Ma mère fait de maladroits efforts pour que l'on se parle (mais sa tendance à me rabaisser quoi que je fasse, gâche tout!, elle a toujours peur pour moi, que je fasse des erreurs! Elle n'a pas compris que vivre, c'est ça, se tromper! On s'en sort toujours!), je m'intéresse à ce qu'elle fait mais nous sommes mal à l'aise. Je ne lâche pas; même si sa tendance à me juger, me dévaloriser systématiquement me dérange, cela ne m'atteint plus, c'est déjà ça! Je prends le bon et renonce au mauvais, je ne me justifie plus m'estimant adulte et responsable!
  Mon père? Absent, aveugle, incapable de prendre une décision minime seul; il a malgré tout comblé ce manque d'amour en partie.
  Ces carences affectives ont longtemps influé sur moi, mon manque de confiance en moi, ma peur de l'abandon et aussi ma persévérance, mon amour des livres (ils m'ont sauvée puis plus tard la danse, le dessin, le chant et la poésie), mon indépendance d'esprit (je me fiche des critiques, je m'assume comme je suis!, ce qui ne signifie pas ne pas se remettre en cause), ma tolérance, ma compréhension, mon instinct qui me mène vers le plus faible.
J'ai mis des années à m'en sortir: aujourd'hui, j'ai gardé les lignes de force que j'ai engrangées et rejeté tout le reste (le manque de confiance en soi, la tristesse, les regrets, la culpabilité aussi!).
  Ma mère? Je sais qu'au fond, elle m'aime (même si elle n'a jamais su le montrer): je m'intéresse à elle, ses projets mais je ne la laisse pas me juger (négativement! toujours) même si je crois que c'est surtout pour elle, un moyen maladroit d'entrer en communication avec moi. Je garde à l'esprit qu'un jour, mes parents ne seront plus là et qu'alors, il sera trop tard pour tenter d'arranger les choses!