samedi 20 novembre 2010

Le monde merveilleux de Rony

   Je reviens sur une expérience professionnelle remontant à plusieurs mois: ma vie chez Mac Donald's!

  Côté ambiance, rien à dire: ambiance décontractée, tutoiement, entraide, jeunesse, bon encadrement et esprit d'équipe sont au rendez-vous...
De même lors de l'entretien d'embauche (10 minutes chrono, un des plus courts de ma vie), j'ai pu noter le côté humain qui primait: j'ai été "mise au parfum" dès le départ, le sourire chaleureux, tutoiement, on m'a proposé une boisson.
Au départ, on te fait faire les boîtes pour les Happy Meal et mettre les jouets dedans, histoire de commencer par quelque chose de sympathique!
Ensuite, viennent les caisses et le lobby (nettoyage du sol de la salle, récupération et nettoyage des plateaux, on vide les poubelles et on change les sacs) puis les frites... Dans certains restaurants, c'est la punition suprême d'après les confidences d'une collègue!

  Le "jeunisme" est à l'honneur de l'équipier au directeur: les "vieux" quittent-ils le navire dès que possible ou sont-ils poussés vers la sortie??

  Le côté difficile fut les cadences en heure de pointe, les procédures à appliquer, très nombreuses dans ce milieu tout nouveau pour moi, les nouveaux produits depuis ma jeunesse (2 ou 3 hamburgers, nuggets, frites et quelques desserts se partageaient la vedette!).
  
  Je ne m'étendrai pas sur les cadences infernales, surtout lors des rush ou heures de pointe (le vocabulaire anglo-américain omniprésent m'horripile au plus haut point), sur le pointage (hors habillage et déshabillage, cela va de soi)  à l'entrée et à la sortie à heure pile s'il vous plaît (histoire de ne pas être payé plus que nécessaire, cela fait très Révolution Industrielle).
En heure creuse, les équipiers n'ont pas le temps de souffler: nettoyage des tables et du sol, ramassage des déchets, vidage des poubelles... Le temps doit être rentabilisé au maximum! Il est interdit de rester à ne rien faire, même s'il n'y a rien à faire! Le fait de prendre une seconde pour évaluer les priorités dans les tâches à effectuer est immédiatement sanctionné: on est rappellé à l'ordre dans la seconde! Stakhanovisme quand tu nous tiens!
En outre, la vache à lait le client est poussé à toujours consommer plus: "Surtout n'oubliez pas de toujours demander "Avec ceci?" à la fin de chaque commande, notre but, je ne vais pas vous le cacher: c'est de faire du chiffre!" dixit notre manager (ah, les anglicismes Macdonaldiens!) lors de la formation.

  On m'a rapidement donné des objectifs de vente par heure à atteindre: je ne donnerais pas de chiffres mais disons environ plus de 5 fois puis plus de 10 fois mon salaire horaire (salaire brut, cela va de soi). La marge sur ce type de produit doit être confortable au vu de la préparation nécessaire (tout est surgelé ou déjà conditionné et au vu du volume écoulé, on peut supposer que les économies d'échelles sont importantes; multiplié par 3 ou 4 caisses plus le drive, l'affaire doit être plus que rentable même en comptant les locaux, les frais d'électricité, les salariés (réduits au minimum du fait de leur grande polyvalence)...).
Au départ, la caisse est comptée en présence du salarié, puis ce n'est pas toujours systématique! Sachant que l'écart de caisse autorisé est de 2 €, qu'en est-il le jour où il y a une erreur?

  Côté hygiène, le lavage des mains n'était pas systématique (malgré une belle affiche) en début et fin de service, après avoir vidé les poubelles (eh, oui!) ou encore après le nettoyage des plans de travail avec des chiffons pas toujours de première fraîcheur après un service... Ceci n'était pas du fait de la direction mais des salariés (peu ou pas formés aux mesures d'hygiène élémentaire, on nous a juste donné quelques consignes à ce sujet qui ne sont pas respectées pour supporter les cadences imposées). Ayant exercé un été dans le milieu de la santé, j'y suis très sensible mais quand j'ai voulu aller me laver les mains après avoir mis un chiffon plus que rentabilisé à nettoyer ou jeté une poubelle, je me suis fait rappeler à l'ordre!
Un sac de frites qui tombe dans une poubelle est "repêché", les frites ne touchent pas les déchets mais je ne suis pas sûre que les normes d'hygiène soient respectées!

  En discutant avec mes collègues, il m'est apparu que Mac Donalds' est toute leur vie: choix ou nécessité? Une carrière d'équipier avec des horaires décalées, en coupé (autrement dit avec un vide dans l'emploi du temps de la journée), à temps partiel et payé au S.M.I.C pour laquelle on sacrifie sa vie de famille et personnelle, est-ce un rêve? Bien sûr, ce n'est pas l'apanage de cette profession mais cet emploi guère épanouissant est associé à beaucoup de pression et qu'en est-il des évolutions de carrière?

 Personnellement, au vu des cadences imposées et des marges pratiquées si l'on jauge le coût de revient des préparations (beaucoup de surgelés, les boissons sont reconstituées avec de l'eau; pardon de casser le mythe), je me dis que le salaire n'en vaut pas la peine si l'on cumule le travail polyvalent, minuté, procédurier à l'extrême, les horaires décalés...
Néanmoins, restent la bonne ambiance et l'esprit d'équipe... Sans oublier le repas offert qui ne représente pas grand chose quand on sait la quantité de nourriture qui est jetée!