jeudi 26 mars 2015

Moi, Azenor B. , fille de parents toxiques 18: Choses à apprendre

  Ces derniers mois, j'ai cherché un "Manuel à l'usage des enfants de parents toxiques" sans trouver. Pourtant, aujourd'hui au début de la trentaine, je suis en train de me refaire mon éducation de A à Z, de revoir mes valeurs, mes bases. Tout détruire pour mieux rebâtir et enfin trouver la paix.
Les livres sur le sujet, c'est très très utile. J'ai trouvé assez peu de récits complets (livres, blogs...), j'ai trouvé des bribes d'histoires de vie sur des fora et des livres de psychologie ou articles traitant de sujets liés (parents toxiques, angoisse d'abandon et personnalité abandonnique, confiance en soi...). Mais je ne trouve pas ce que je veux, c'est à dire, les connaissances, les compétences que les parents sont supposés transmettre à leurs enfants. Oui, comment combler des lacunes si on ne sait pas qu'on a celles-ci, sachant que dès le départ, on mettra des années pour y arriver. Si, en plus, on passe du temps à tâtonner, la vie passe en attendant, les années s'écoulent et on ne vit pas aussi pleinement qu'on aurait dû ou pu. Je pense que je mettrai cet article à jour au fur et à mesure de mes avancées. Je ne trouve pas ce que je veux donc je le fais moi-même.
Je me base principalement sur mon expérience personnelle mais si ça peut aider quelqu'un, tant mieux!
Pour tenter de ne rien oublier, je vais me baser sur les 14 besoins fondamentaux de Virginia HENDERSON.

I RESPIRER
Respiration
C'est simple, j'ai une respiration faible: elle n'est pas ample et profonde. Forcément, ma voix porte assez peu, ce n'est pas gênant car je le sais et je fais un effort si je dois parler fort. Mais ce fut un long apprentissage.

II BOIRE ET MANGER
Addiction au sucre
J'en ai parlé, j'ai une addiction au sucre pour tenter de combler un vide. Mes parents m'ont donné de bonnes bases alimentaires, je me suis lâchée au départ sur les produits auxquels je n'avais pas droit mais j'ai mis des années avant de me l'autoriser. 

Cuisiner
Qui dit parent toxique dit tout faire pour limiter mon autonomie. J'ai acheté un livre de cuisine et j'ai commencé par des choses simples: pâtes en sauce, crêpes, quatre-quarts. Il y a eu du gâchis, des ratages mais j'ai fait comme j'ai pu, d'autant plus que je suis très limitée par mon budget.

III ELIMINER

IV SE MOUVOIR ET MAINTENIR UNE BONNE POSTURE
Attitude corporelle
J'ai du mal à occuper l'espace, avoir des gestes souples et expansifs, rire bruyamment. J'ai fait des exercices de théâtre donc c'est mieux. J'ai l'impression de lutter sans cesse entre la réserve imposée par mes parents toxiques et un mélange de réserve et d'expansivité qui me semble naturelle. 

Façon de se tenir 
Même chose, j'ai envie de dire. Généralement, je sais quoi faire de mon corps, de mes mains et je me fiche de ce que pensent les gens.

V DORMIR ET SE REPOSER

VI SE VETIR ET SE DEVETIR 
 Apparence
Ce n'est pas compliqué, j'ai appris à m'habiller, me coiffer, me maquiller dans les magazines féminins (vous savez ceux avec 25 % de publicités pour des produits hors de prix, 70 % d'articles redondants qui font passer les femmes pour des cruches sans cervelle et 5 % d'articles intéressants), activités hautement intellectuelles.
J'ai commencé par du terne (vêtements noirs, gris, bleu marine comme ma mère; maquillage pâle et qui se voit peu) et peu à peu, j'ai intégré que du plus "visible" valait le coup d'essayer suffisamment de temps pour m'y habituer (la révélation du rouge! Ca me va, alors que pendant longtemps un haut rouge m'a semblé osé...). J'ai mis beaucoup de temps à oser les décolletés, les vêtements moulants ou courts (hormis pour aller en boîte, mais c'est "pour de faux", on est d'accord, pas pour tous les jours).
J'ai accentué mon maquillage pour des couleurs plus voyantes, en harmonie avec mon visage, sans rentrer dans le vulgaire. Merci les magasines féminins pour le coup. Au début, le maquillage, c'était pour les soirées, pas tous les jours...
J'ai encore du mal avec les décolletés trop plongeants ou les vêtements trop moulants, ce qui est dommage car je me plais comme je suis physiquement et que je ne serais jamais aussi jeune que maintenant. Mais j'y travaille...
Parlons des matières, tiens! J'aime les matières douces au toucher (laine), j'ai du mal à rester peu habillée (débardeurs ou jupes courtes), je me suis forcée et habituée peu à peu même s'il reste le souci de la température (voir VII).

VII MAINTENIR SA TEMPERATURE 
Je suis terriblement frileuse, même en été, j'ai toujours un pull. Je ne sais pas si c'est lié à une carence affective, mais on dit que les gens seuls ont tendance à prendre des douches plus chaudes qu'en temps normal.

VIII ETRE PROPRE, PROTEGER SES TEGUMENTS
 Niveau hygiène, rien à dire, je crois. 
Quant au fait de me protéger, j'avoue ne pas être douillette, je ne vais pas faire une montagne d'une simple coupure. Il est vrai toutefois que je suis parfois assez dure avec moi-même.

IX EVITER LES DANGERS
L'addiction au sucre, ce n'est pas très bon pour la santé, on est d'accord (même si c'est plus un doudou pour combler une carence affective) mais je surveille et je reste globalement raisonnable. Même en période de "craquage", je limite la quantité de sucre que j'achète pour ne pas endommager ma santé à long terme.

X COMMUNIQUER
Communication non verbale
Je crois me souvenir que j'étais une petite fille rieuse, pleine de vie et assez active. J'ignore si c'est un faux souvenir, mais les photos semblent confirmer cette impression. En tous cas, j'ai appris au fil du  temps à prendre le moins de place possible corporellement, à laisser transparaître le moins de sentiments possible et acquérir une très bonne maîtrise de moi.
Il y a deux trois ans, j'ai décidé de changer certaines choses et apprendre à occuper l'espace. J'ai trouvé sur internet des exercices de théâtre qui m'ont beaucoup aidée qui consistaient à mimer des situations, des façons de marcher, expérimenter plusieurs intonations de voix selon des situations imaginaires. La première fois, c'est dur, je me suis sentie RIDICULE toute seule dans mon salon, j'ai eu du mal à rester sérieuse! Mais ça a vraiment débloqué "un truc".

Communication verbale
J'ai énormément travaillé le volume de ma voix, je me suis renfermée au fil du temps vu que j'étais dénigrée par mes parents. J'ai donc gardé mes opinions pour moi. Comme toutes mes joies ont été systématiquement cassées par le rappel d'une faute commise (une mauvaise note qui ne donnait pas "le droit" d'éprouver de la joie par exemple), j'ai appris à cacher mes joies, à tel point que c'est devenu une seconde peau. J'ai une très bonne maîtrise de moi-même (bien que j'ai réussi ces dernières années à lâcher du lest, c'est naturel mais je sais me maîtriser en général si j'en ai besoin) malgré que je sois très spontanée "à la base".

J'ai du mal à utiliser le "je", je passe par le "nous" le plus souvent, comme si je fuyais mes responsabilités (ce qui est loin d'être le cas!). C'est mieux mais je fais très attention à ne pas occulter le "je" sous l'effet du stress (lors d'un entretien pour parler d'un travail effectué de manière collective). On m'en avait fait la réflexion lors du passage d'un concours, comme quoi les gens ont sans doute été assez hypocrites: ils ont dû le voir sans m'en parler.

J'ai appris à me montrer très positive mais quand je suis avec une autre personne, j'ai du mal à exprimer cette positivité et je passe souvent par des tournures négatives. Au lieu de dire que les choses se sont bien passées, je dirais plus facilement qu'il n'y a pas eu de problèmes. Ca ne veut pas tout à fait dire la même chose, on est bien d'accord.

J'ai du mal à tourner les compliments. J'ai compris il y a quelques années déjà, l'importance de complimenter les gens sur les efforts qu'ils font, leur montrer ce qu'ils font de bien. La majorité des gens va pointer le négatif, ce qu'on ne réussit pas mais savoir ce qu'on réussit est important non?? Pour les compliments banals (ça te va bien, tu es beau/ belle, tu as l'air d'aller bien...), il n'y a pas de soucis majeurs, l'habitude aidant. Mais pour les compliments plus extraordinaires (au sens premier), du genre "Je trouve vraiment génial que tu n'ai rien lâché dans cette passe difficile.", je suis moins à l'aise, je me sens plus gauche bien que cela vienne du cœur. Je pense que cela vient du fait que dans notre société, à la base, on fasse plus facilement des reproches que des compliments.

Reconnaître les gens toxiques

XI AGIR SELON SES CROYANCES ET SES VALEURS
 Définir ses valeurs Trier ses croyances
J'ai dû à un moment trier mes valeurs: qu'est-ce qui est "moi" et qu'est-ce qui est ce qu'on aurait voulu que je sois pour les assumer totalement tout simplement. Ce n'est pas si simple, mine de rien de retrouver son vrai moi quand on l'a enfermé durant des années.
J'ai dû également trier mes croyances. Je suppose que c'est un tri qu'on fait à l'adolescence mais comme je n'ai pas pu m'exprimer à cette époque là...

Avoir suffisamment confiance en soi pour oser être soi
C'est déjà plus difficile! Comme par définition, des parents toxiques vont tout faire pour fondre l'enfant dans un moule et le modeler selon leur convenance et que pour ce faire, saboter la confiance et l'estime de soi de son enfant est un très bon moyen pour ça, c'est dur. Il faut déjà apprendre à s'aimer, reconnaître ses qualités et ses défauts, les accepter, oser agir malgré les échecs et la désapprobation. 

XII SE REALISER
Gérer mon ménage
Je ne savais pas où le mettre! J'ai dû apprendre seule à gérer mon ménage au sens large: budget, courses, administratif, nettoyage, bricolage, réparation de voiture, planifier mes loisirs, connaitre mes goûts en matière de décoration...
C'est simple: j'ai fait! Je n'ai pas trouvé de livre consacré à la question, mais internet m'a sauvée. Oui, pour faire ma première machine, j'ai bien dû me débrouiller seule. Pour les produits ménagers, j'ai lu les étiquettes tout simplement, j'ai vu les effets des produits et j'ai testé pour élargir leur utilisation. Pour tout dire, je suis passée au fait maison et je fais mes mélanges de savon noir, vinaigre de ménage et bicarbonate de soude! Comme quoi, les bonnes "ressources documentaires", ça aide (oui, "C'est du propre!", ça compte). J'ai dû chercher sur internet comment on change un sac d'aspirateur, à quelle fréquence on fait le ménage (oui, oui!), comment on utilise une machine à coudre...

Faire des projets sans abandonner en cours de route
Je ne compte plus le nombre de fois où je suis passée pour une imbécile avec mes questions (l'avantage, c'est que ça arrive une fois et après, on est tranquille). Planifier un trajet, réserver un hôtel, se renseigner sur une formation, c'est très varié à mon sens. J'ai rarement vu mes parents faire ce genre de choses, donc je n'ai pas appris comment faire. Là, c'est pareil, "j'ai fait" comme je pensais qu'il fallait faire.

Ne plus s'interdire des choses S'autoriser à réaliser ses rêves
"Une personne qui s'aime ne s'interdit rien." Sauf que ce n'est pas si simple quand nos parents ont tout contrôlé! Il est nécessaire de se rappeler qu'on a le droit de faire ce qui nous plait (tant que ça reste légal et ne nuit à personne évidemment), de faire des erreurs. C'est vraiment quelque chose à intellectualiser, parce que oui, on va faire des erreurs, c'est le passage obligé mais tellement formateur. Alors, faire des erreurs, ce n'est pas grave! On apprend, c'est normal (et la preuve qu'on agit...). Même si l'entourage dit le contraire (normal, je vous le rappelle, il est toxique!) et remet en doute nos capacités, se montre suspicieux. Oui, j'ai le droit d'aller passer une journée à la mer; oui, toute seule; oui, je vais me faire un resto seule et alors???; non, je ne vais pas me faire agresser plus qu'ailleurs; non, je ne cache rien, c'est quoi ce regard suspicieux??; non, ma voiture ne va pas tomber en panne (et quand bien même, l'assurance sert à quoi?); non, je ne serai pas fatiguée, c'est à 2 heures de route; oui, je n'ai jamais conduit autant sur la journée mais il faut bien commencer un jour et puis, j'ai mon permis non??? Et en cas de souci, j'arriverais bien à trouver une solution, je suis grande!
J'ai 30 ans et je veux me mettre à la danse Africaine et alors??? Il faut bien commencer un jour, non?
Et commencer par les lister, c'est bien pour ne pas en oublier en route avec les ressources nécessaires (budget, temps, horaires et dates d'ouverture, site internet...).

XIII SE RÉCRÉER
S'autoriser à se faire plaisir
 Ca  a été très difficile pour moi. M'acheter ce qui me fait envie (avec le budget, je précise). Ne pas culpabiliser de perdre du temps ou de l'argent pour des choses triviales. J'ai personnellement un souci avec les choses d'enfants: je suis fascinée par ce que je n'ai pas eu étant plus jeune niveau jouets. Les Barbies aux robe de princesse ou les Pollypocket, on oublie mais les dvd de dessins animés de qualité (type Disney ou Don Bluth), les livres jeunesse (il y a des trucs bien d'ailleurs et parfaitement lisibles par les adultes), le matériel de peinture, je m'autorise le droit de l'acheter.

Prendre soin de soi  
Je ne sais pas faire. J'apprends à le faire par petite touche: un achat plaisir, faire mes cosmétiques, faire des bains de pied ou des massages, tester des coiffures. Pour moi, ce n'est pas naturel, normal au sens premier (dans la norme). 

XIV APPRENDRE 
Arriver à faire face aux évènements
On m'a appris que faire des erreurs, c'était grave; que je ne savais "pas faire"; que j'étais nulle et on ne m'a pas appris à être autonome. Donc en cas de souci, j'ai appris à gérer sur le tas (en faisant parfois un beau carnage!) et vous savez quoi? Je m'en suis toujours sortie. Une batterie à changer? Merci internet! Un dossier administratif à monter? Et bien, c'est simple, la première fois que je suis allée à la caf (je crois), la femme de l'accueil m'a prise de haut car j'ai posé une question "bête". La colère a été plus forte et je lui ai rétorqué que c'était la première fois que je faisais ça et que je ne savais pas. J'ai eu la réponse à ma question et mon regard noir a suffi à mettre l'autre personne mal à l'aise.