mardi 31 mars 2015

Moi, Azenor B. , fille de parents toxiques 21: Et le pardon dans tout ça?

  Il me semble ne pas avoir abordé ce sujet qui m'a littéralement déchirée durant des années. Et pourtant, il est très important en fin de processus. 
Est-ce pardonnable? Qui est pardonnable? Quoi pardonner? Comment pardonner? 

  Entre 7 et 30 ans, j'ai essayé de pardonner, de comprendre, de trouver des explications (et non des excuses!). Et je n'ai pas réussi car pour moi, ce n'est pas pardonnable, même si c'est justifiable et que je veux bien comprendre que les racines de cette souffrance sont profondes. 

  Ma mère a eu une enfance difficile dont je sais peu de choses, mais elle a eu des carences affectives et un cadre trop strict, c'est certain. Mon père a sans doute été aimé mais il a eu des carences éducatives, un manque de cadre.Vu comme ça, les choses s'équilibrent. Moi, j'ai eu les carences affectives et le cadre trop strict.

  Mon père était souvent absent pour son travail, il jouait parfois avec nous et ses bisous étaient sincères sans grandes effusions. Mais comme ma mère si on sortait des schémas qu'il avait prévu pour nous, ce n'était pas bien. Le souci, c'est que je n'ai jamais correspondu à l'image qu'ils avaient de moi, même si pour me faire aimer et surtout avoir la paix, j'ai tenté de me fondre dedans durant de longues années. Un enfant, ce n'est pas une plante qu'on va modeler avec des tuteurs et à coups de cisaille! 

  Ma famille n'a rien vu ou a fait/ fait semblant de ne rien voir. Hormis une tante qui est entrée plus tard dans la famille, je n'ai jamais pu parler à cœur ouvert de tout ça. J'avais déjà bien entamé mon adolescence et il était déjà beaucoup trop tard pour "me sauver". Elle n'a jamais rien dit à mes parents, hormis dire à mon père que ma mère était en souffrance. Ma famille a laissé faire, mais comment pouvaient-ils savoir? Je pense qu'ils ont eu des doutes mais même s'ils nous en avaient parlé, aurions nous avoué? Je ne crois pas, j'aurais dit qu'il y avait un souci, parlé de certaines choses, ce qui aurait pu atténuer certaines brimades et les amener à renforcer leur présence sur le plan affectif. Peut-être que ça aurait tout changé pour nous, la carence affective aurait été moins importante, nous aurions pu être plus valorisés et avoir une meilleure estime de nous. Peut-être même que la famille aurait "appuyé" pour nous permettre de partir étudier ailleurs à 18 ans, une fois majeurs. 
J'ai tenté d'en parler avec une autre tante, il y a quelques mois mais elle a minimisé la chose, elle est médecin pourtant! 
J'en veux à ma famille, je peux comprendre et je veux bien pardonner certaines choses, mais pas le fait que personne n'ai rien vu! Etre plus présent à partir de 16-17 ans, ça restait possible. Nous inviter de temps en temps le week-end pour nous permettre de respirer et nous traiter en adultes sans nos parents, c'était possible, non? Nous dire que même si nos parents ne nous montraient pas qu'ils nous aimaient, nous dire que eux nous aimaient? Je ne sais même pas s'ils m'aiment, j'ai seulement lu de l'amour dans le regard de mes grands-parents partis trop tôt. Ils ne me l'ont jamais dit clairement, mais leur regard plein d'amour, mes mains qu'ils serraient parfois me suffisent largement. Ils sont partis depuis longtemps mais ils restent présents dans mon cœur, dans les moments difficiles, je pense à eux et je revois leur regard plein d'amour. Ils seront toujours dans mon cœur.
Là encore, j'ai choisi de ne pas pardonner. Depuis que je vis seule, ils ne sont guère présents ce qui ne compense pas le passé.

  Quoi pardonner? Rien! Je ne pardonnerai rien. Ni les blessures du passé, ni les coups, ni les mots qui blessent et détruisent, ni les conséquences de mes parents toxiques (carence affective, personnalité abandonnique, manque de confiance en moi, occasions manquées, addiction au sucre, relations toxiques, rêves avortés et j'en passe).  J'ai essayé durant plus de 20 ans sans y parvenir car ça ne me convenait pas et ça a créé un énorme conflit intérieur. J'ai mis du temps à comprendre que non, je ne pouvais pas pardonner même si je le voulais. Ce n'était pas juste! Ce n'est pas juste pour ce "vrai moi" qu'on a empêché de vivre et qui a tant de mal à se fondre aujourd'hui avec ce que mes parents ont fait de moi; ce n'est pas juste pour cet enfant qui a pleuré maintes fois sur son oreiller et a fui dans les livres; ce n'est pas juste pour l'adulte que je suis qui doit "faire avec" et fait parfois des erreurs qui font mal.

  Je ne peux pas pardonner l'impardonnable, ce Moi détruit que je me bats chaque jour pour faire ressortir.